COVID 19 : formidable accélérateur de la science ! l’exemple de l’anosmie en ORL

L’olfaction était probablement le moins étudié de nos cinq sens jusqu’à l’apparition du SARS COV 2. En un an nous avons appris beaucoup de choses!

L’odorat : comment ça marche ?

Le nez capte les molécules odorantes qui sont amenées à la partie haute du nez via le mucus dans le bulbe olfactif qui sert de véritable « gare de triage » : les cellules nerveuses olfactives codent l’information olfactive en impulsions électriques et l’envoient à différentes zones du cerveau (dont la zone de la mémoire et des émotions qui sont très liées à l’odorat).

Telle la madeleine de Marcel Proust, nous avons tous l’expérience d’une odeur capable de vous replonger en enfance (en nous faisant éprouver une émotion positive ou parfois négative).

L’odorat à quoi ça sert ?

Il a un rôle d’alerte : par exemple, sentir le brûlé ou une fuite de gaz pour éviter les dangers.

Il permet de reconnaitre des saveurs complexes : si les quatre saveurs principales (salé-sucré-amer-acide) ne nécessitent que la participation des papilles gustatives situées sur la langue, la reconnaissance de saveurs complexes nécessite la participation de l’odorat (c’est pour cela que les aliments paraissent fades lorsqu’ on a un rhume banal car la muqueuse de l’odorat est temporairement détruite).

Sur le long terme, l’absence de plaisir à manger et de reconnaitre des saveurs complexes influent sur notre moral et peut induire des vraies dépressions tant le plaisir de manger est important culturellement, voire professionnellement  comme les « nez » dans la parfumerie ou les sommeliers.

 

L’odorat et le Covid :

Jusqu’ à l’épidémie du Covid, on savait que certains virus (la grippe par exemple) pouvaient donner une anosmie (perte d odorat). On essayait de traiter avec des corticoïdes mais sans grand succès.

Avec l’épidémie de Covid, les choses ont changé:
  • L’anosmie est très fréquente: selon une étude européenne sur plus de 6000 patients atteints de Covid, elle atteint 52% des cas, est plus fréquente chez les femmes et caractérise plutôt les formes de faible gravité.
  • Elle est en général brutale et ne s’accompagne pas de nez bouché ou d’écoulement nasal.
  • La valeur prédictive d’avoir la Covid devant une anosmie est très élevée (bien supérieure a la toux ou aux maux de tête) d’où le dogme actuel de faire une PCR devant toute anosmie (même si on est vacciné).
  • Elle évolue favorablement en 15 jours à trois semaines et disparait aussi brutalement qu’elle est apparue.

Malheureusement dans 20% des cas, elle persiste ou se transforme en phantosmie (odeur qui n’existe pas), parosmie (odeur à la place d’une autre) ou en cacosmie (mauvaise odeur).
Ces manifestations peuvent survenir dans la continuité de l’anosmie ou apparaitre après un intervalle libre de tout symptôme.

Le recherche clinique et fondamentale nous ont apporté un certain nombre de données intéressantes :
  • L’atteinte initiale pendant la phase aigüe correspondrait à un œdème de la fente olfactive qu’on voit très bien sur le scanner ou l’IRM et dure environ 15 jours à trois semaines.
  • Pendant cette période ou après, il peut se créer comme une fibrose cicatricielle pouvant expliquer que certains cas ne récupèrent pas après l’œdème initial de la phase aigüe.
  • Les études chez le hamster (dont l’appareil olfactif est proche du notre) ont montré (au microscope électronique) que le Covid pouvait détruire massivement les cellules sus-tentaculaires de soutien de la muqueuse olfactive, lesquelles cellules mettraient 45 jours à se On ne sait pas très bien comment se comportent les cellules nerveuses de l’olfaction si ce n’est qu’elles ne sont pas ou peu touchées par le virus.

Les conséquences de l’avancée de nos connaissances :

  • On sait que la rééducation olfactive est le seul traitement à ce jour qui a montré son efficacité.
  • Les choses s’affinent sur l’opportunité de faire des lavages au sérum physiologique (et quand les faire) ou sur l’intérêt de rajouter des corticoïdes locaux (par exemple pour éviter la fibrose cicatricielle)

La Haute Autorité de Santé française (HAS) a même édité le mois dernier une fiche de recommandations à l’attention des généralistes faite en collaboration avec les ORL français sur la conduite à tenir qui fait consensus dans la spécialité.

 

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